28.04.2012 / L'Amalgame
Kap Bambino
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« Blacklist »
Attention. Kap Bambino fonce droit sur vous, tel un bolide punk-rock lancé à pleine vitesse. Contrairement à la plupart des assauts rock sans foi ni loi, celui-ci ne puise pas son énergie dans des guitares, ni dans un quelconque instrument de musique, d’ailleurs. Cette éruption puissante de dissonances frénétiques, de beats d’un autre monde qui arrivent comme un direct du droit, et d’incantations félines, le duo Bordelais, Caroline Martial et Orion Bouvier, l’a obtenu en domestiquant l’énergie de groupes dissipés comme Suicide ou Nirvana, pour les passer ensuite dans leurs moulinettes de sampleurs, claviers et autres modules informatiques.
Sur scène, le manifeste de Kap Bambino est clair : un mélange de libération et d’abandon, tout ça au nom de l’amour, ou encore une énorme fosse à pogo nouvelle génération où le simple badaud est livré à un cyclone de membres dispersés, d’enthousiasme débridé et de comportements simplement débiles. « Ça peut paraître cliché », dit Caroline en souriant, « mais tout ce qu’on fait, on le fait comme si c’était la dernière fois. Chaque concert, le dernier. Chaque morceau qu’on enregistre, pareil. Chaque avion qu’on prend, on part du principe qu’il s’écrasera. Je pense que c’est ce qui fait la spécificité de notre musique ».
Quand ces deux-là se sont rencontrés dans une fête en 2001, il y a eu une connexion immédiate et intrinsèque que Caroline décrit joliment comme « de l’électricité ». Ils suivaient chacun de leur côté des chemins très similaires : de mauvais groupes de punk hardcore, de la philosophie de comptoirs, et des expériences timides du côté du « noisetronica* ». Après avoir comparé leurs notes étrangement similaires, il est devenu évident qu’ils étaient destinés à unir leurs forces et à enfin commencer à mettre des projets sur pied. Ce fut d’abord leur label Wwilko, qui abrite depuis plus de huit ans un nombre impressionnant de groupes de libre-penseurs électros de formes diverses, et enfin, Kap Bambino. Caroline a mis un moment à convaincre Orion de la laisser pousser ses cris sur les déferlantes de sons apocalyptiques qu’il sortait de son laptop.
Suivirent de nombreux maxis, des singles, un album et d’innombrables concerts chaotiques d’électronique « noise-pop love-punk ». Il y eut « Love » (1er maxi), leur premier délit commun en 2002, où les hurlements à la mort de Caroline étaient étouffés par des distorsions paralysantes, et les pistes d’Orion déchiquetées par une intensité métallique digne du « grindcore »**. Puis le pétage de plombs de la locomotive “Zero Life, Night Vision“ (leur 1er album) en 2006, qui les a introduits dans le giron de la culture « noisy-rave » avec pour apogée la compilation “Digital Penetration“ de Alt Delete. Ils sont passés comme un fléau sur l’Europe, l’Amérique et le Japon avec leurs légendaires concerts qui déclenchent des émeutes, tout en récoltant des hommages dithyrambiques de la presse, comme le NME, Dazed&Confused, Another Magazine, ou Dummy.
Et maintenant ?
Eh bien, “Blacklist”, le second album de Kap Bambino marque un tournant ambitieux dans la carrière du groupe. Le virage le plus inattendu aurait sans doute été de virer pop, et c’est exactement ce qu’ils ont fait, enfin presque... “Blacklist” c’est 12 morceaux de mélodies dérangées et affolantes, de rythmes propulsés qui font hocher la tête, prenant les concoctions typiques du groupe et les plaçant dans un univers de stade, pour une tête d’affiche de festival. Les voix de Caroline sont mises en avant, elles n’ont jamais été aussi limpides, si fraîches et pleines de défi. L’alchimie des productions d’Orion sonne comme le travail d’un orchestre d’androïdes mettant en musique une guerre apocalyptique. Pour Kap Bambino, le sens des chansons n’est pas le plus important. Quand on demande à Caroline de quoi parle le morceau ‘Bat Cave’, elle ricane, « Ca parle du fait que c’est une bonne période pour les bat caves en ce moment. Un appel à toutes les chauves-souris ». A propos de ‘Lezard’ : « Je regardais un documentaire à la télé sur les lézards, et je me disais qu’un jour j’aimerais me débarrasser de ma peau ». Euh… Ok. Ce qui leur importe vraiment par-dessus tout c’est ’exécution des morceaux. « C’est comme quelque chose à l’intérieur de moi » explique Caroline. « Comme une bête qui se libère en moi. Quand ça se passe devant des gens, ça agit comme une grande libération pour tout le monde ». Ça c’est clair.
* noisetronica : mélange de musique noise et d’électro expérimentale
**grindcore : musique extrêmement rapide et brutale issue du punk et du death metal.
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